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DOCUMENTS INÉDITS CONCERNANT LES PROJETS DE A.-J. GABRIEL ET N.-H. JARDIN POUR L’ÉGLISE FRÉDÉRIC A COPENHAGUE

PUBLIÉS PAR CHRISTIAN ELLING

H ENR IK KOPPEL, ÉD ITEUR COPENHAGUE 1931

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ÉDITÉS SOUS LES AUSPICES DE LA «FONDATION NY CARLSBERG«

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L ’architecture danoise du XVIII’e siècle culmina à Copenhague aux environs de 1750 par la construction d’un nouveau quartier ré* gulier, »la cité Frédérics autour d’une place octogonale encadrée par quatre palais nobiliaires, Amalienborg, résidence actuelle des rois de Danemark. Ce palais a sans doute été inspiré par les nombreuses constructions de places françaises de la première partie du siècle (à Rennes, Bordeaux, Lyon etc.) et tout particulièrement par le grand concours ouvert en 1748, en vue de l’établissement d’une nouvelle Place royale à Paris et qui aboutit à la construction de la Place de la Concorde. Le premier homme d’Etat danois, le comte J. H. E. Bernstorff qui, depuis son séjour comme ambassadeur à Paris, de 1744 à 1750, était devenu un admirateur fervent de l’art fran* çais, devait avoir eu connaissance, par le «Mercure de France**, auquel il était abonné, de ce concours qui éveilla le plus vif intérêt de tous les artistes et hommes de goût. L’inspiration de »la cité Frédéric« est sûrement venue de France, mais le style de la construction était —comme la plus grande partie de l’architecture danoise de ce temps —directement influencé par le style allemand. Or le premier archi* tecte du roi, Nicolas Eigtwedt (1701—54), un rare talent, avait fait ses études, plus spécialement en Saxe et en Pologne, et l’architec* ture civile de ces pays trahissait précisément plus l’influence du style français (Longuelune élève de Mansart) que celle des autres états allemands. C ’est ainsi, que »la cité Frédéric» forme un ensemble d’une harmonie merveilleuse; elle était française dans sa conception

6 mais, grâce à l’influence allemande, elle paraissait moins sévère, plus riche, sans avoir cependant perdu la distinction du pur style Louis XV du Faubourg Saint*Germain (1). L’art danois du milieu du XVIII’e siècle est caractéristique à ce point de vue que, pour l’église monumentale projetée (1749) dans le nouveau quartier, c’est le style baroque, toujours latent, qui se fit valoir. Les différents projets authentiques d’Eigtwedt pour l’église Frédéric, dont nous reproduisons ici le plus vieux connu (Planche 2) — seulement la façade — ne peuvent être compris que quand on connaît l’art italien. C ’est avec raison qu’on les a rapprochés d’un projet anonyme dont le plan (2) porte le nom d’Eigtwedt au verso — et qui semble donc lui avoir appartenu —et qu’on a essayé d’attri* buer cedit projet, en partie à Eigtwedt (3) et en partie à un archi* tecte germanodtalien, Marcus Tuscher, travaillant alors au Dane* mark (4) (Planche 1). Ce fut d’ailleurs sans succès, car on n’avait pas remarqué que ce plan était une copie exacte d’un projet élaboré par Filippo Juvara, pour l’église de la Superga à Turin. (5) C ’était la pièce de réception du célèbre architecte sicilien (1706 ou 1707) à l’Académie de San Luca à Rome qu’Eigtwedt a pu copier pendant son séjour en Italie (1734-35). Cependant, les premiers projets de l’architecte danois, pour l’église Frédéric, établis sur la base de ce dessin et fortement influencés par la Frauenkirche de Georg Bahr à Dresde, ne plurent pas à la cour, — les ministres en trouvaient le style démodé et, un voyage d’étude à Paris n’ayant pu être réalisé, le gouvernement s’adressa, en 1753, année précédant la mort de l’il* lustre architecte, à notre ambassadeur à Paris le comte Ditlev Re* ventlow en lui demandant de chercher de nouveaux dessins chez un architecte français connu. Il fallait respecter les fondations déjà posées et par la-même, les dispositions principales d’Eigtwedt: une rotonde centrale avec deux tours dans l’axe transversal. Grâce sur*

Planche I. Filippo Juvara: Projet pour la Superga. Élévation. Copie probablement par N. Eigtwedt. (Archives nationales. Copenhague).

*1

Planche II. N. Eigtwedt: Projet pour l’Église Frédéric. Élévation. 1752. (Archives nationales. Copenhague).

7 tout aux recherches approfondies de Mario Krohn (6) cet épisode est tout à fait éclairci. Ange*Jacques Gabriel, alors Premier archi* tecte du Roi et incontestablement le plus éminent architecte de France, fut choisi. Il consentit à se charger de la tâche et, durant l’été de 1754, il envoya à Copenhague deux projets quelque peu différents, désignés A et B. Ceux-ci n’obtinrent pas non plus l’approbation du Roi et il fut conclu la même année un arrangement suivant lequel Nicolas=Henri Jardin acceptait de venir à Copenhague, comme ar* chitecte du Roi pour présider à la construction de l’église Frédéric. Un homme de grande influence, le baron Crozat de Thiers, neveu du célèbre collectionneur Pierre Crozat et ami du tout-puissant mi* nistre, le comte Bernstorff avait plaidé la cause du jeune architecte à peu près inconnu, auprès de ce dernier; toutefois, c’est le secrétaire d’ambassade à Paris, Joachim Wasserschlebe, ami intime de plusieurs artistes de renom (Boucher, Massé, Cochin, Saly —camarade de Jar* din à l’École de France à Rome) qui servit d’intermédiaire entre Jardin et le Gouvernement. Jardin vint au Danemark au commencement de l’année 1755 et présenta au cours de cette année et de l’année suivante, quatre projets différents: les deux premiers étaient des variantes de la même disposition d’ensemble, le troisième n’est pas entièrement connu, et le quatrième fut approuvé par le roi en 1756, et publié par Jardin sous le titre: »Plans, coupes et élévations de l’église Royale de Frédéric...«, en 1765. La construction de l’église fut alors commencée, d’après ces plans mais, comme on le sait, elle ne fut pas achevée (7). L’ouvrage de Mario Krohn nous a éclairé sur l’origine des projets de Gabriel, sur la venue de Jardin et le début de son activité à la construction de l’église, mais cela ne nous avance guère quant à la solution de la question fondamentale: est-il possible de désigner avec certitude les projets de Gabriel et les deux premiers projets (les va* riantes) de Jardin?

8 Dans la préface de son grand ouvrage illustré de planches »Fre- derikskirken i Kjobenhavn« (aussi publié en allemand, 1896) qui reproduit tous les dessins existant sur l’église Frédéric —se trouvant en partie dans les archives de l’Etat à Copenhague, en partie dans les archives de l’Académie des Beaux-Arts en cette ville —F. Meldahl s’est occupé, le premier, de cette question. Il considère que les des­ sins des planches XVII—XXI reproduisent le projet original de Ga­ briel, et crut publier les deux projets originaux de Jardin aux plan­ ches XXV—XXVIII. Cependant, dans son très intéressant traité sur l’église Frédéric, publié dans »Fra Arkiv og Museum«, I (1896), Fr. Schiott proteste énergiquement contre la première de ces suppo­ sitions. Selon lui, les plans attribués à Gabriel étaient dus à Jardin et représentaient le troisème projet de l’église. Peu de temps après ces plans furent toutefois attribués à un troisième architecte, par Vilh. Wanscher qui, en 1911, découvrit Georg David Anthon, In­ specteur des bâtiments du Roi, relativement inconnu, à qui ils se­ raient imputables (8). En même temps, il exprime des doutes sur l’authenticité des plans XXV—XXVIII publiés par Meldahl mais sans nommer d’autre architecte. Fr. Weilbach apporte les plus ré­ centes connaissances à la discussion dans »Architekten« XXII (p- 285 suiv.). Il admet, d’une part, avec Meldahl et Schiott que les dessins XXV—XXVIII soient attribués à Jardin et du point de vue du style, estime, d’autre part, pouvoir faire remonter les dessins XVII—XX à un des deux projets de Gabriel dont ils sont vraisemblablement des copies dues à Anthon. Il fait exception pour le dessin XXI, parce qu’il l’attribue au troisième projet de Jardin. Il nous semble que les documents Nos 1 et 2 reproduits ci-des­ sous, jusqu’ici inconnus (9), ne laissent aucun doute sur le bien-fondé de la supposition de Weilbach en ce qui concerne les premiers des­ sins de Gabriel et les deux premiers projets de Jardin. Grâce à ces

9 deux rapports qu’Anthon, sur demande, avait fait parvenir au Grand Maréchal de la Cour, le Comte Adam Gottlob Moltke, Surintendant officieux des Bâtiments du Roi, nous pouvons abandonner le do* maine dangereux des hypothèses. Nous possédons maintenant des données positives sur les projets respectifs de ces deux architectes français. En se basant sur ces données pour examiner les planches de Meldahl, il apparaît très nettement: 1°) que les dessins XVII—XX sont des copies d’un des projets de Gabriel (B) (Coupe et élévation combinées et plan re* produit sur les planches 3—4). 2°) que le dessin XXII est un dessin perspectif par Anthon du projet de Gabriel (B) 3°) que les dessins XXV—XXV III peuvent être identifiés aux premiers projets (originaux) de Jardin. (Élévation, plan et coupe reproduits sur les planches 5—7.) Les points de vue architectoniques sur lesquels se base la critique qu’Anthon fait des travaux de ces deux architectes français ne sont guère susceptibles d’intérêt. Lui, talent médiocre, élève d’Eigtwedt, était un partisan fervent de ce «modèle de théâtre« employé pour les églises protestantes, notamment en Saxe, ainsi que pour les églises à coupoles avec plan circulaire (Frauenkirche à Dresde) (10). La chaire placée au*dessus de l’autel avait ici une place prédominante. Ainsi la critique d’Anthon trahit l’influence du goût allemand qui régnait en Danemark vers le milieu du XVIIIe siècle et il était donc naturel qu’Anthon réagit contre le style Louis*Seize apparaissant. Etant donné la médiocrité de ses aptitudes, son jugement était peu compétent et, dans le cas dont il s’agit, il manquait également d’im* partialité, Anthon espérait, en effet, devenir lui*même l’architecte de

10 l’église et obsédait dans ce but le Comte Moltke de ses propres projets. Il est beaucoup plus intéressant d’examiner les dessins de Jars din en partant des points de vue architectoniques les plus moder# nés de l’époque, du néoclassicisme le plus dogmatique. Il est bien connu que les deux premiers projets de Jardin pour l’église Frédéric — variantes sur le même sujet —ont été soumis vers la fin de 1755, aussi bien à l’Académie de l’Architecture de Paris qu’à l’Académie de France, à Rome où l’on demanda l’appréciation des architectes ita# liens et, à ce qu’il semble, des élèves français. Jusqu ’à une époque toute récente, personne n’avait eu connaissance de ces appréciations critiques qui pouvaient pourtant compter sur le plus vif intérêt. La première —celle de l’Académie d’Architecture fut publiée en 1923 par H. Lemonnier dans son admirable ouvrage »Procès#verbaux de l’Académie Royale d’Architecture« VI, 254—56. Deux autres appré# dations rédigées en langue française, viennent de voir le jour dans les archives de Moltke (documents Nos 3—4) qui ne reproduisent pourtant pas les originaux. On en possède une copie et une traduc# tion allemande. Comme il manque à ces documents, non seulement un titre plus précis, mais encore une signature et une date, leur pro# venance est tout à fait hypothétique. Il découle de leur texte comme de la réfutation publiée plus tard par Jardin (Document No. 5) qu’il s’agit des premiers projets de Jardin. Tout ce que nous savons c’est que ces critiques ne proviennent pas de l’Académie d’Architecture de Paris dont nous connaissons bien la déclaration, et ne sont pas non plus identiques aux déclarations d’architectes romains. Ceux-ci prirent leur parti à l’égard du travail de leur collègue, mais décidé# rent de ne pas donner leur avis par écrit. Nous avons appris ceci par deux lettres adressées au Comte J. H. E. Bernstorff, l’une par le Duc de Choiseul, alors ambassadeur de France, à la Cour du Pape,

11 l’autre par le jeune Comte A. P. Bernstorff qui, à cette époque — printemps de 1756 —était à Rome (11). Cependant, Jardin avait aussi envoyé des copies de ses projets à différents experts à Paris, dont il souhaitait connaître l’avis. Parmi ceux-ci se trouvait le célèbre praticien Tannevot chez qui notre ar* chitecte avait travaillé comme conducteur entre son retour de Rome 1748 et sa venue au Danemark en 1755 (12). Pourtant il n’est pas probable que Tannevot soit l’auteur de l’une de ces critiques. Elles diffèrent toutes deux complètement dans leur conception de l’appré* ciation de l’Académie d’Architecture que Tannevot en sa qualité de membre du jury, avait signée et peut-être également rédigée puisqu’il en était le doyen. Par contre, le Baron de Thiers qui était une sorte de Chargé d’Affaires artistique du cercle Bernstorff à Paris, fait men* tion dans une lettre d’autres autorités dont Jardin avait souhaité entendre le jugement. Il n’était pas très indulgent, il qualifie en effet leurs opinions comme »des avis insertins®, comme »un chique choque dopinions qui ne font que donner cette espese dinsertitude qui des* espere l’artiste et qui degoute ceux qui l’employent . . .« (13). Il est probable que les paroles indignées du baron s’adressent aux archi* tectes qui sont les auteurs des appréciations que nous discutons ici, celles-ci ayant été entièrement inspirées par le théoricien d’architec* ture, le Père Jésuite Laugier dont les opinions hardies pour l’époque firent naître une discussion très vive entre les architectes français et qui étaient bien propres, en effet, à déconcerter un vieil amateur de la génération de Robert de Cotte (14). D ’ailleurs, il est possible que ces deux critiques (ou l’une d’elles) proviennent d’élèves de l’école de France, à Rome —possibilité aussi difficile à prouver que celle que nous venons de citer. Cependant, ces critiques portent tel* lement l’empreinte des principes de Laugier qu’il n’y a pas d’intérêt essentiel à en connaître les auteurs.

12 Plus haut nous avons vu Jardin en opposition au style rococo d’Anthon, maintenant nous allons le voir s’écarter du néoclassicisme de Laugier. Il réfute longuement ses critiques anonymes dans un traité qui est heureusement conservé en original (15). Ce manuscrit a droit au plus grand intérêt de la part de tous ceux qui s’occupent de l’artiste français et de ses travaux. Il constitue un commentaire abondant, aidant à la compréhension de ses premiers projets, tant débattus, il indique les sources dont il s’est inspiré, défend leur ap* port artistique et fournit des renseignements précieux sur sa manière d’envisager l’architecture religieuse en général. Il se révèle comme l’antagoniste absolu des prétentions bornées et doctrinaires de Laugier et se manifeste dans sa polémique ainsi que dans ses derniers travaux (le palais de Bernstorff, la caserne de Solvgade, le pavillon situé der* rière le palais de Christian VII) comme étant profondément enraciné dans les traditions françaises de la première partie du siècle, plus qu’on n’aurait pu le croire, à en juger des projets d’église en ques* tion. Par la même occasion, nous faisons la connaissance d’un homme très versé dans la science de la discussion, adroit, élégant et douce* ment ironique. Nous possédons, en outre, les propres observations de Jardin sur son troisième projet que l’on n’a pas encore réussi à identifier (document N ° 6). Weilbach renvoie le projet à la planche XXI de l’ouvrage de Meldahl, mais son avis ne nous paraît pas bien motivé. Ce dessin révèle une ressemblance si frappante avec le projet B de Gabriel, tant pour l’ensemble que pour les détails, qu’il n’est guère possible qu’il provienne de Jardin. Il est fort probable que ce soit la copie d’un dessin du projet A de Gabriel qui nous est in* connu.

Planche III. A.-J. Gabriel: Projet pour l’Église Frédéric. Élévation et coupe. Copie. (Archives nationales. Copenhague).

I

MÉMOIRE PAR G. D. ANTHON AU COMTE A. G. MOLTKE DATÉ LE 16. SEPT. 1755. (SUR LE PROJET B. DE GABRIEL) Hochgebohrner Graff hôchstgebietender Herr Geheimter Raht und Ober Hofï Marechall Gnadiger Herr! Euer Hochgraffl: Excellence Gnadigen Befehl zu unterthanigsten folge, habe die mir zugestelte und hiebey zurückfolgende Zeichnun* gen Litr. B. von den Hr: Premier*Baumeister Gabriel zu den Kir* chen Bau alhir in der Grossen Kônigs Strasse entworffen, genau untersuchet, überleget, berechnet und befunden, dass darnach zu den auszuführenden Bau ohne Altar, Cantzel, Orgel und Uhrwerk laut angebogener allerunterthanigsten Berechnung allergnadigst ohngefehr zu destiniren ware die Summa 1103477 Rd. Was nun ferner 1) den auswendingen Prospect und Zierde der Kirchen anlanget, finde dass selbe Façade und Profil Zeichnungen, in aile wege in und ausserlich prachtig ausgearbeitet ist, wan aber allerhôchst belie* bet würde, hierüber eine Perspectivische Zeichnung nach selbigen Maassstab der distance von gleicher weite und Hôhe wie die zween vorigen [16], allerunterthànigst zu entwerffen, würde sich zeigen dass die Frontespice so über den Portai, das Fenster mitten vor in der Couppel Etage über die Helfte bedeckete, die Bühne so zur verhohung dieser Couppel Etage ist, wird wegen des vor* stehenden Portais gar nicht zu sehen seyn, wodurch auch die

14 Couppel Etage ein niedriges und gedrucktes ansehen erhalt, und bey der Laterne würde es gleichen effect geben [17]. 2) Den innern Raum und dessen Nutzen in der Kirchen betreffend, so weit die Zuhôrer den Prediger sehen folglich auch gut hôren kônnen, enthàlt der Untere Plan mit den Logen, ohne den Altar Platz. . 1200 □ Ellen Samtl: Polpulturen mit Ihro Kônigl: Maytt Stuhl. . 984 □ Ellen 2184 □ Ellen Auf jede quadrat Elle, kan man einen Zuhôrer überhaupt sitzend und stehend, den verhandenen Raum berechnen. 3) Die inwendige Hôhe der l te Polpultur vom Fussboden bis der Ober* kant der Brüstungshôhe h a it ................................. 91/2 Elle und J. K. M. Stuhl......................................................... 11 Ellen 2te Po lpultur........................................... ........................ 1572 Elle 3te Polpultur.................................................................... 203/4 Elle 4te Polpu ltur.................................................................... 29 Ellen Die Oberkant der Cantzel vom Fussboden ist hoch 972 Elle 4) Das inwendige Licht angehend, da sind um den Unter Coridor mitten vor den vier Eingangs Thüren in der Kirche 4 Fenstern 3 Ellen breit 6 Ellen hoch, die übrigen 4 Fenster dienen den Coridor so zu denen Logen führet zu beleuchten. In der lte Pob pultur über denen Eingangs Thüren sind 4 Logen, dahinter 4 Fenstern 3 EL breit, 6 EL hoch, die ihr Licht durch den 4 Logen in der Kirche beytragen. Die übrigen 4 Fenstern dienen nur den Coridor, und etwas weniges in denen übrigen Logen zu beleuchten. Die 2te Polpultur hat nur ein weniges Licht von obigen 8 Fenstern auf Fussboden des Coridors.

Planche IV. A.-J. Gabriel: Projet pour l’Église Frédéric. Plan. Copie. (Archives nationales. Copenhague).

II MÉMOIRE PAR LE MÊME AU MÊME, DATÉ LE 5. SEPT. 1755. (SUR LES DEUX PREMIERS PROJETS DE JARDIN)

Hochgebohrner Graff hôchstgebietender Herr Geheimter Raht und Ober Hoff Marechall Gnadiger Herr! Euer Hochgrâffl. Excellence gnadiger Befehl zur allergehorsahm* sten folge, meine unterthànige Erklâhrung und Berechnung zu geben, über des Sehl: Obristen und Hoff Bau Meister Eigtwedt entworffene und den 6. Maji 1754 allergnadigst approbirte Zeichnungen, wie auch über derer Hrn. Professoren Jardins verfassete zween Desseins, anlangend den Kirchen Bau in der Grossen Kônigs Strasse, Sol* chemnach habe allerpflichstschuldigst eines jeden Zeichnung unter* suchet, genau überleget, berechnet und befunden, dass zu den aus* zuführenden Bau, ohne Altar, Cantzel, Orgel und Uhrwercke, be* sage angebogener allerunterth. Berechnung Litr. A allergnadigst ohn* gefehr zu destiniren wâre, nach denen allergn. approb. Zeichnun* gen [3- les dessins d’Eigtwedt] die Summa.................... 598890 Rd. und nach denen Professoren Jardins ersten Dessein sub. sig.

17 cellence vormahls von dem Sehl: Obristen Eigtwedt bereits vor* gewiesen, unterthânigst insinuiren sollen, dagegen den Unter* schied desto deutlicher vor Augen legen zu kônnen, habe nach selbigen Maaszstab von Distance gleicher weite und Hôhe auch über derer Hrn. Jardins Zeichnungen auf beyderley Desseins eine Perspectivische Zeichnung sub. sig. @ und "b bemercket, allerunterthanigst entworffet, so wie der ausserliche Prospect der Façade nach beyden Gassen einen jeden ankommenden und vor<= bey passirenden in die Augen fallen kan. 2) Betreffend den innern Raum und dessen Nützen in der Kirchen, so weit die Zuhôrer den Priester sehen, folgl. auch gut hôren kônnen............. [19] Nach der Professoren Jardins Dessein angebracht.......................................................................... 1510 Ellen Samtl. Polpultur mit Ihro Kônigl. May« Stuhl.......... 373 Ellen 1883 Ellen Auf eine jede Quadrat Elle, kan man einen Zuhôrer überhaubt sitzend und stehend, den verhandenen Raum berechnen. 3) Die inwendige H ôhe.........nach Professor Jardins l*e PoP pultur, vom Fussboden bis der Oberkant der Brüstungs* hôhe hait..................................................................................9 Ellen findlich.................................................................................. I 6 V 2 Elle 3te Polpultur als Nischen in den 4 Haubt Pfeilern. . . 26 Ellen 4 *e oberste Polpultur gantz umher.................................321/2 Elle Diese Hôhen der Polpulturen sind deswegen angemercket, weil es beschwerlich fait 34 El. oder 136 Tritte à 6 Zoll fur denen Sind Logen als Nischen in denen 4 Haubt Pfeilern. 2*e Polpultur .gantz umher worauf I. K. M. Stuhl be* Untere Plan ohne Altar Platz, mit denen 4 Logen, so in den 4 Haubt Pfeilern als Nischen

18 Zuhôrern so hoch zu steigen, und bey Herm Jardins Polpultur kônnen nur diejenigen hôren und sehen, so vorne an der Brü* stung zu stehen kommen, welcher Raum wie vorhin angezeiget 373 □ Ellen betragen. 4) Betreffend das inwendige Licht [ . . . est-elle suffisante dans le projet d’Eigtwedt . . . ] dagegen sig. € et c/ in einer Hôhe von 47 Ellen sich 4 Runde Fenstern befinden 41/2 Elle breit, davon sind 2 Fenstern von den Neben Thürmern bedecket, welche nur 6 Ellen davon abstehen, als da man dadurch den Him* mel nicht sehen kan, folglich wenige Erleuchtung in der Kir* chen geben. In der Couppel Etage durch das Grosse Gewôlbe 66 El. hoch, sind 8 Fenstern à 3 El. breit, 6 El. hoch, die nur einige massige Erleuchtung aus solcher Hôhe in der Kirchen geben kônnen. Die Coridors und Polpulturen in denen 4 Haubt Pfeilern erhalten durch den Treppen Hausern auch nur ein mâssiges Licht, weil dieselben Fenstern mehrentheils von denen Treppen verbauet sind. 5) Innerliche Weite und Hôhe der Kirchen mit der Gewôlbe, ist . . . nach sig.: € et

I I I MÉMOIRE FRANÇAIS ANONYME SUR LES DEUX PREMIERS PROJETS DE JARDIN (COPIE SANS DATE) Ce Batiment est en general d’une invention magnifique, et quand il sera achevé, il n’aura que peu de pareils en Allemagne, même parmi ceux qui sont nouvellement bâtis; c’est pourquoi il faudra faire d’autant plus d’attention à éviter tous les defauts, qui pour* roient se glisser dans ses parties, à fin que la beauté du tout puisse d’autant mieux sauter aux yeux [a]. Ce qu’on trouve à redire au plan c’est 1° que le mur de façe est trop court en proportion de la coupole et qu’il ne peut rien perdre de ses belles parties, surtout à cause des deux Tours, qui sont placées dans le goût d’une Architecture noble et mâle (b) [20]. Le premier étage ne sauroit remédier à ce défaut, pour ne rien dire de ce que la magnificence et le bon air se perdent sensiblement en ce que le portail commence par un rustique suivi des colonnes Doriques qui en font le second étage, ou plutôt, sur lequel les colonnes sont placées, ce qui fait un piédestal excessif (c). Ce*ci empêche aussi de faire une belle Arcade au dessus de l’entrée de l’Église du coté extérieur du portail, et cause que la porte qu’on y a faite, semble être écrasée comme cet etage entier et appartenir aux souterrains (d). Sur un édifice où l’on veut étaler les richesses d’Architecture, la hauteur du mur de façe est déterminée par les divers rangs des colonnes (e).

20 2° Que les deux cotés reculés du Portail sont ornés de pilastres engagés et quarrés, ce qui n’a point de proportion avec les colonnes isolées de la façade et ôte au Portail une bonne partie de sa grand air (f). Ce qui doit déterminer la place d’une colonne isolée, c’est qu’elle doit soutenir quelque fardeau; mais cela n’étant pas exécuté par un pilastre engagé" parceque la muraille rend le même service, il est ici superflu (g). [21]. Ce seroit une belle décoration au Portail, si l’on pouvoit chan* ger ces pilastres engagés en colonnes isolées et ne point charger le mur de derrière d’aucuns pilastres, mais au lieu de cela le décorer de panneaux, ce qui pourroit se faire très bien en marbre. Cette observation aura aussi lieu à l’égard des pilastres engagés dont on doit enrichir intérieurement l’Eglise, d’autant plus qu’il est naturel, que les ornemens intérieurs l’emportent de beaucoup sur ceux du dehors. Voici modestement proposé le changement qu’on pourroit faire dans le plan. (h). Il faudroit entailler le mur qu’on a déjà élevé jusqu’à la hauteur de 3 pieds de la terre et à la largeur que permet l’espace des co* lonnes isolées; La partie inférieure de 3 pieds servira de socle à la muraille, à cette hauteur doivent aussi monter les marches libres, qui pourvues d’un large pallier doivent environner tout le portail. Et puisque le fonds sur lequel cette Eglise va être bâtie, est outre cela humide on devroit remplir tout à fait l’espace intérieur de ce socle /: à l’effet de quoi nous proposerons cbaprès quelques expe* diens :/ pour dissiper les vapeurs qui s’élèvent [22J. On présup* pose que par la construction de cette Eglise on voudroit commencer à abolir la mauvaise coutume d’enterrer les morts dans les caveaux des Eglises et les inhumer ailleurs (i). La partie supérieure du socle devroit être seulement ornée d’une Plinthe avec peu de saillie qui à causse de sa simplicité auroit plus

Planche V. N.-H. Jardin: Projets pour l’Église Frédéric. Élévations. (Archives nationales. Copenhague).

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21 de beauté étant de marbre; après cela on mettrait immédiatement un rang de colonnes Doriques, auquel la susdite [retraite servira de socle général (k). Ce premier rang de colonnes devrait avoir un Architrave de l’ordre Dorique, avec les deux plattebandes qui finiraient par une Doucine de peu de saillie. Il s’entend de sobmême, que les 2 rayes ne doivent pas avancer bien sensiblement, mais se reculer vers le haut. Je ne conseillerais point d’employer sur ce rang tout l’entablement Dorique avec toutes ses parties l m° parceque suivant les réglés de l’Ar* chitecture et du bon goût ce n’est que le rang supérieur des colonnes qui obtient tout son entablement, 2° parceque la corniche qui avance beaucoup et les autres parties fortes de l’entablement Dorique peuvent dans la suite être endommagées par l’injure du tems. 3 ° parceque sa grande saillie couvre ou rend invisible la partie inférieure ou les bases des colonnes du second rang, ce qui nuit à la proportion et présente aux yeux au moins un vice apparent. Pour remédier à ce défaut l’Architecte est obligé sans nécessité de faire là dessus une retraite de plus de deux pieds, et de pratiquer encore une socle pour le second rang des colonnes, ce qui fait un aspect assez desa= greable (1) [23]. Si nonobstant cela on vouloit employer tout l’entablement Dos rique, ce qui est sans contredit un défaut, parcequ’il représente dans le milieu du bâtiment quelque chose qui appartient au toit, Je suis de l’avis de Mr: Blondel qui fait dans ce cas les profondeurs intermediaires ou les espaces entre les Triglyphes ou Metopes plus hauts que larges parcequ’ils représentent à l’œil qui les contemple d’en bas, le quarré convenable. Au contraire, quand on les fait quarrés, comme font quelques Architectes, qui n’observent point les Réglés de l’Optique, ils paroissent plus larges que hauts, ce qui est un défaut (m) [24].

22 Au dessus de cet Architrave on élève le second rang de co* lonnes, qui est le Ionique, immédiatement sans socle, car un socle représenteroit ici un fondement au milieu d’une muraille, ce qui est contraire à la nature. Ces colonnes ont une longueur selon la réglé de l’Optique, dont Mr: Boffrand à mon foible avis a montré le plus clairement la proportion, quoiqu’il ait compris dans sa mesure les socles qu’il place entre chaque rang [25]. Les socles et les piédestaux ne sont que les moyens imparfaits d’allonger les colonnes courtes; On n’a qu’a y employer un assez grand module et alors ou aura les colonnes parfaites et l’on évitera un défaut quoiqu’avec un peu plus de dépenses (n). Ce [dernier] rang de colonnes se termine avec un entablement entier Ionique dans lequel se trouvent toutes ses parties, et qui à cause de sa corniche est le plus beau. La dessus on pourroit à son gré mettre un fronton avec un Cartouche dans lequel seroit le chiffre de sa Majesté, au bien une balustrade avec un socle au milieu et qui seroit couronné d’un tel Cartouche (o). De cette maniéré l’Eglise elle*même s’eleveroit beaucoup d’avant tage, ce qui n’est point un défaut dans ces édifices, mais donne plutôt un air plus grand. Mais en cas qu’on ne le voulut point, on aura recours à un Attique au lieudu rang de Colonnes Ioniques, ce que je ne conseillerois point. Cet important édifice qui doit transmettre à la postérité non seulement un splendide monu* ment de la Générosité de son Auguste Fondateur, mais encore un témoignage des progrès faits dans les sciences et dans les arts sous son glorieux Régné, seroit par là considérablement défiguré. Ce demi* étage seroit une ceinture audessus du rang des colonnes Doriques par rapport à la coupole, dans le plus bas étage, de laquelle on a employé quelque chose d’arbitraire, ce qui aura un air d’autant plus desagréable, que ses courtes parties paroissent encore

23 plus courtes par la hauteur et représentent quelque chose de gêné, de confus et de grossier (p). Le bon goût ne peut point souffrir un Attique même dans les batimens communs, qui ont une façade longue, et ou on prétend hausser le Portail par là. Les lieux où on peut l’employer, sont les arcs de Triomphe, principalement ceux qui sont construits de bois, lesquels ne doivent point porter un grand fardeau; car alors il re* présente une balustrade qui couvre le toit (w) [26],

IV

MÉMOIRE FRANÇAIS ANONYME SUR LES DEUX PREMIERS PROJETS DE JARDIN (COPIE SANS DATE) On ne trouve rien à redire aux Colonnes, ni à la maniéré, dont elles sont placées, et leur proportion paroit être reguliere, quoique je ne sçais point, comment leur module est compté par rapport à l’aune. Je voudrois plutôt, si j ’avois quelque chose à dire, changer les colonnes adossées, en colonnes isolées, délivrer le mur des niches et en faire sortir les statues avec leur piédestaux, afin que ces ornes mens s’ils restoient dans les niches, ne fussent point offusqués par les colonnes [27]. Les colonnes et leurs entablemens en general des mandent à la vérité beaucoup de dépenses; mais elles sont absolus ment necessaires pour cet Edifice tant au dedans qu’au dehors (q). Mais il semble, que ce soit un défaut d’avoir mis deux Attiques l’un sur l’autre, surtout parceque celuy d’en bas, qui ne consiste qu’en champs variés et en petits piédestaux, se perd sensiblement par rapport au plus haut, sur lequel est employé l’Ordre Corins thien avec toute sa spendeur. Les Statues érigées ne reparent point ce défaut (r). Et dans le second dessein la faute paroit plus grande en ce que le plus bas Attique pose sans raison sur un double entablement, dont l’espace intermédiaire est pareillement orné des champs (s). Pour ce qui regarde l’Attique supérieur que le Dôme couronne, il est très beau, mais il a ce défaut inexcusable, qu’il est placé sur

Planche VI. N.-H. Jardin: Projet pour l’Église Frédéric. Plan. (Archives nationales. Copenhague).

25 un gradin de differens socles, ce qui luy donne l’air d’un Edifice singulier, construit sur une terrasse, auquel il faut monter par un escalier (t). Peutêtre, que l’Architecte a eu pour cela ses raisons, que je ne suis pas en état d’entrevoir, mais il est impossible, que le but en soit d’augmenter la force pour porter le Dôme; parceque le grand fardeau de pierres ne fait que charger de plus en plus l’Arcade, sur laquelle icy tout pose, pour ne rien dire de ce que cet escalier ressemble a une partie d’une Pyramide Egyptienne (v). Il est icy à remarquer encore, que les quadres des fenêtres et les autres ornements, qui semble pris de l’ordre Ionique, sont trop grossiers et trop pesants pour s’accorder avec la délicatesse de l’ordre Corinthien (y). Pour éviter le mauvais air du plus bas Attique et des socles entassés les uns sur les autres, je mettrais l’ordre Ionique sur l’ordre Dorique d’en bas, et sur l’ordre Ionique l’ordre Corinthien, que l’Architecte a déjà choisi. J ’entourerois la terrasse montante d’une Balustrade basse, et je placerais des grouppes ou statues sur les Piédestaux intermediaires, et j ’abandonnerais entièrement la balu* strade la plus haute du Dôme (z). Ce qu’on épargnerait sur les statues, suffirait pour effectuer ledit Etage Ionique (x). Quant a l’interieur de l’Eglise, j ’espere, qu’il ne manquera pas d’ornemens de bon goût, car ceux du dedans doivent avec raison surpasser ceux du dehors (&). L’Architecte n’a pas marqué la hauteur de l’Estrade sur laquelle l’autel doit reposer. Suivant les réglés elle doit etre proportionnée à la hauteur de l’Eglise et etre elevée considérablement, par con* sequence on évitera le defaut commis dans la chapelle de Christians» bourg [28]. Mais cet autel ne rendra*tdl pas invisible la collonade

26 voisine? Du reste je crois que l’Eglise en elle*meme aura assez de lumière par le Dôme, cependant je crains, que les portiques ne soient pas assez éclairés; mais on pourroit remedier a ce defaut par le second Etage, parcequ’on y pourroit faire autant de fenêtres, qu’on voudroit (I). Je voudrois bien louer les Tours, s’il y en avoit moyen, mais dans les deux desseins elles ressemblent à une lanterne de mer, ou à une Tour, bâtie dans un port ou dans une entrée périlleuse. En un mot elles ne sont qu’un morceau grossier de pierres fait à des* sein, qui n’a ny la hauteur, ny la forme, ny la legereté d’une Tour d’Eglise. Dans le second Dessein surtout le haut et excessif entable* ment fait, que la Tour y paroit plus basse et plus coupée, qu’elle ne l’est. Mr. Laugier dispute à ses Compatriotes d’à présent l’art d’inventer et de construire une belle Tour d’Eglise. à la page 235 il décrit la forme, que doit avoir une belle Tour en ces mots: »(1) Que les divers etages soient par retraites, ce qui produit la diminution pyramidale, (2) qu’on supprime dans tous les etages inferieurs toutes les parties de l’entablement qui par leur saillie tranchent l’ouvrage, et au lieu d’un tout présentent l’idée des par* ties détachées sans union, sans continuité; (3) Que dès le second etage la Tour cesse d’etre quarrée et devienne octogone, ou du moins prenne telle autre forme que l’on voudra, approchant d’avan* tage de la figure ronde, et s’éloignant de la dureté et de la seche* resse de la figure quarrée. (4) Qu’on n’y employé que de colonnes isolées, afin que l’ouvrage soit tout à jour, d’ou resuite la legereté et la delicatesse«. De toutes ces qualités, qui sont bien fondées dans la nature, on n’en trouve pas une seule dans ces desseins.

V

MÉMOIRE PAR JARDIN AU COMTE A. G. MOLTKE (ORIGINAL SANS DATE)

REPONSE AUX DEUX MÉMOIRES D'OBJECTIONS FAITES SUR LES DEUX PROJETS, ENVOYÉS A PARIS ET A ROME

Les productions de L’architecture sont peut-être celles de tous les arts sur lesquelles il est le plus difficile de porter un jugement solide et éclairé, les principes de cet art sont bien puisés dans la nature, mais les effets, les conséquences de ces principes appartiens nent totalement a l’art, aussy ne convienfiil guêres qu’aux personnes egalement consommées dans la théorie et la pratique de cet art de s’ériger en critiques et même en reformateurs, on courre risque de s’égarer quand on ne consulte qu’un seul auteur; il faut les con* noître tous, vingt cinq années employées a l’etude de la théorie et a la pratique de cet art, a la lecture réfléchie des meilleurs auteurs anciens et modernes, a l’examen attentif, même sur les lieux, des plus beaux monuments de l’antiquité, a la comparaison de ceux cy avec les modernes,- m’ont conduit et guidé dans les projets que j ’ay présentés a la cour et semblent m’authoriser a soutenir les raisons et les principes qui m’ont conduit dans la composition de ces pros jets contre les objections par écrit qui m’ont été communiquées. Pour procéder avec un peu d’ordre, je vais commencer par donner un précis des motifs qui m’ont déterminé dans cette composition

28 et je reprondray ensuitte aux deux mémoires d’objection et de critiques par des nottes marginales. Ce n’est point la deffense de mon amour propre que je veux prendre icy, c’est uniquement celle des principes qui m’ont guidé et je puis assurer que je suis dans la disposition la plus sincere d’ecouter les objections qu’on me fera et de profiter avec docilité de celles qui pourront me fournir quelque lumière pour m’approcher davan* tage de la perfection qui est le but auquel je m’efforce d’atteindre. La forme et la grandeur de cette eglise se trouvoient a peu près indiquées par les éclaircissements qu’on m’a donnés, par la nombre des personnes qu’elle doit contenir et surtout par les fondements jettés depuis quelques années qu’il est important de ne pas rendre inu* tiles. cette forme peut être regardée comme une des plus convenables pour une eglise ou trois mille personnes doivent entendre distincte* ment la prédication. Il est essentiel de donner a chaque édifice la caractère qui luy convient mais surtout dans une eglise cette réglé doit être severement observée, une distribution simple et naturelle de toutes les parties necessaires a la destination du lieu, une communiquation aisée, une entrée libre et facile, noble et majestueuse, une lumière suffisante et ménagée, une grande exactitude de proportions, une grande et noble simplicité, sont les seuls moyens de parvenir a ce Caractère si important et si recommandé par tous ceux qui ont connus les grands principes de l’art, c’est aussy a quoy je me suis efforcé de parvenir dans ces projets et j ’ay taché d ’y reunir les qualités que je viens de détailler. Il n’etoit pas de moindre conséquence de faire beaucoup d’atten* tion a la place ou doit être érigé cet édifice, aux bâtiments qui l’environnent et aux rues qui y aboutissent, tout cela doit enfluer sur la Composition, les bâtiments par leur proximité deviendront

29 un objet de comparaison avec l’eglise et il étoit important, que l’avant corps du portail et la partie supérieure du Dôme pussent être vus dans leur entier dedans la place Royale afin de fo[r]mer un aspect agréable de ce point de vuë qu’on peut regarder comme un des principaux, les yeux sans contredit seroient choqués de voir le fronton qui couronne cet avant corps, coupé des deux côtés par les deux palais qui terminent la rue du côté de l’Eglise [a: les Hôtels de Bernstorff et de Dehnj. Cette matière me fourniroit encore bien des reflexions, mais cela deviendroit trop long et je m’en tiens aux plus essentieles. d’ailleurs l’examen que je vais faire des deux mémoires d’observations et cri* tiques qu’on a fait me donneront lieu d’en placer quelques unes qui deviendront d’autant plus sensibles qu’elles seront en opposi* tion avec les assertions un peu legerement faites que ces deux me* moires renferment. Il y a dans l’architecture, comme dans les autres arts, des choses qui sont a la portée de tous ceux qui réfléchissent et qui pensent, mais aussy chaque art a ses secrets et ses finesses qui sont des choses de detail qui luy appartienent directement et qu’on ne devine point, quelque supériorité d’esprit et de lumières qu’on ait d’ailleurs, parce* que ce ne peut être que le fruit d’une étude particulière et très Ion* gue qu’on ne fait ordinairement que quand on y est obligé par état. C ’est une reflexion naturelle que me fournit d’abord la lecture des critiques auxquelles je me propose de repondre, je n’y vois que des notions vagues sur l’archi[tec]ture, le Sistème du Pere Laugier adopté sans reserve et sans choix, mais je n’y vois point ce qui caractérisé le véritable artiste, c’est a dire cette fermeté de principes qui n’admet que le bon et le beau en cette expérience de pratique, qui rappelle tout a l’execution et qui ne permet point a l’imagina* tion d’enfanter des chimères qui luy répugnent.

30 NOTTES EN REPONSES [29].

(a) C ’est tout a fait mon intention et je le répété, je suis entière* ment disposé a saisir avec empressement toutes les lumières qu’on pourra me fournir pour la plus grande perfection de mes projets. (b) Sçavoir ce qu’on entend par ce mur de face trop court en pro* portion de la coupole, est*ce en hauteur ou en longueur, qu’il est trop court? veut*on parler du mur qui porte le Dôme ou de celuy du portail? le plus sage party est je crois, de ne pas repondre a ce qu’on ne sçauroit entendre, de peur de se tromper. (c) je voudrois pouvoir me dispenser de faire la guerre aux mots mais l’abus qu’on en fait icy rend ce qu’on a voullu dire in* intelligible, car les noms de rustique, d ’etage et de piédestal, conviennent aussy peu l’un que l’autre au simple socle sur lequel pose l’ordre du portail, on peut bien faire un socle rustiquée mais celuy*ci ne l’est pas. prendre un socle pour un étage c’est prende la partie pour le tout et dire que cela forme un piédestal excessif c’est renverser toute proportion puisque décidément un piédestal doit avoir au moins le quart de la hauteur de l’ordre qu’il porte. Ce socle n’a de hauteur que la quantité de marches qu’il faut monter pour arriver au niveau du carreau de l’eglise. il ne peut pas avoir moins car il seroit plus convenable d’augmenter le nombre des marches que de le diminuer. (d) une arcade ne conviendroit point icy. que l’on consulte tous les plus beaux morceaux en ce genre soit antiques, soit modernes, certainement on n’y trouvera pas d’arcade avec un peristile. il faut de la convenance en tout, la porte de l’Eglise est dans la meilleur proportion recuë comme telle depuis plus de 2000 ans pour les portes quarrées. Les portes de St. Pierre de Rome,

31 monument le plus vaste qu’il y ait dans le monde, ne sont pas plus grandes que celles cy, cependant personne ne leur a encore reproché d’être trop petites. Certes la méprisé seroit étonnante si l’on pouvoit s’abuser au point de croire entrer dans un sous* terrain par une porte de 11 pieds de large sur 24 de haut après avoir monté un degré de 13 marches et passé dans un péri* stile de colonnes Doriques de cinq pieds de diamètre. (e) Par un principe directement opposé on doit dire, la hauteur d’un édifice proportionée a son étenduë détermine le hauteur et le diamètre des differents ordres qu’on y veut employer car une Colonne n’est qu’une partie de l’edifice et c’est un principe sur que la partie doit ceder au tout. (f) Pour que ce reproche put avoir quelque apparence de fondement, il faudroit au moins qu’il y eut des pilastres, mais il n’y en a pas un seul dans toute l’etendue de la façade de l’eglise. (g) Ce n’est point du tout le fardeau qui doit déterminer la place des colonnes isolées, on doit ou contraire observer de les charger moins que les colonnes engagées qui partagent leur fardeau avec le mur dans lequel elles sont engagées, ce qui fait que ce fardeau ne les pousse pas incessamment au vuide comme celuy des colonnes isolées, quant aux pilastres dont on reparle encore, je ne le devine pas mieux que dans le precedent article. (h) Sans contredit, les panneaux pour lesquels il semble qu’on ait une prédilection, pourroient s’exécuter très proprement en marbre, il n’y a qu’une difficulté, c’est que le bon goût les permet a peine dans une décoration de menuiserie que l’on veut rendre un peu noble et male, a l’egard des pilastres de intérieur de l’Eglise, la décoration et la solidité les rendent absolument necessaires dans les endroits ou ils sont placés. Parceque le Pere Laugier n’aime pas les pilastres, il ne faut pas en conclure qu’ils sont

32 toujours mauvais et déplacés, ce n’est pas la seule chose qu’il ait blâmée fort legerement. qu’il préféré les colonnes aux pi* lastres partout ou on sera libre de choisir, personne ne contes# tera que ce soit bien fait, mais que, contre la nécessité et aux dépends [dépens] du bon goût, on veuille les anéantir, cela n’est pas proposable. les plus beaux morceaux de L ’antiquité crient cet attentat. Dans le Panthéon la variété qu’ils forment avec les colonnes indépendamment de leur utilité forme un spectacle admirable. Dans les morceaux modernes les plus admirés leur beauté et leur utilité se peignent partout ou ils sont employés avec choix et jugement, qu’on examine les monuments de l’an# tiquité on en verra au temple de Mars le vengeur, a celuy de Nerva Trajan, a celuy d’antonin et de faustine, a celuy du soleil et de la lune, rapportés tous dans Palladio. Si l’on veut consulter les plus beaux édifices modernes, on en verra au temple de Bramante, autrement St- Pietro in montorio, a St. Pierre de Rome, aux églises du College Romain, des Sts- apôtres, du jesus et beaucoup d’autres ou les pilastres sont employés avec avantage. Je crois n’avoir rien obmis pour la magnificence de l’inte# rieur, il n’y aura que des ornaments choisis et convenables, tout ce qui ne tend pas au grand en est exclue ainsy que dans toute la décoration extérieure. (i) cecy est étrange a la question, il ne s’agit pas encore de la con# struction, mais pour rendre l’Eglise saine il y a un moyen plus simple et plus sur que celuy qu’on propose icy. C ’est de pra# tiquer des souterrains et de leur donner de l’air, la chose est sensible et c’est de l’avis des meilleurs praticiens. (k) la simplicité du socle tel qu’il est, est préférable a l’ornement déplacé du plinthe qu’on demande, ce socle doit servir de repos aux marches que se terminent contre et a l’ordre qu’il porte.

Planche VII. N.-H. Jardin: Projet pour l’Église Frédéric. Coupe. (Archives nationales. Copenhague).

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33 (1) Tout cecy est une suitte du Sisteme du Pere Laugier mais le • principe étant faux toutes les conséquences qu’on en tire sont invalides, on verra plus bas le vice et l’inconsequence de ce principe, je remarqueray seulement icy, qu’il n’est pas possible de citer un seul exemple, soit antique ou moderne, ou l’on ait eu le mauvais goût de défigurer ce bel ordre au point qu’on le propose icy. d’ailleurs, quand même le conseil que l’on donne dans ces critiques de supprimer la partie essentiele et caracteri* stique de l’ordre Dorique, ne seroit pas absolument opposé aux réglés de l’architecture et de bon goût, ce ne seroit assurément pas icy le cas d’en faire l’usage puisque dans les portails de mes projets j ’ay évité avec soin de mettre deux ordres l’un sur l’autre et que celuy que le critique y suppose n’a pas d’exi* stence possible. Quoy? parceque le tems pourra détruire la corniche de l’ordre Dorique il faudra la supprimer? mais par la même raison il faudra supprimer toute saillie d’architecture et en general tout ce qui porte le nom de corniche, car le tems n’epargnera pas plus celles d’en haut que celles d’en bas. Qu’on ne s’eleve point contre la grande saillie de la corniche dorique, c’est qu’il y a de mieux imaginé, de plus beau, et de plus mâle dans l’architecture, réfléchissons un instant sur le principe de son ennemy le Pere Laugier, plutôt que de suivre le party raisonnable de mettre sur cette corniche un socle pro« portioné à la saillie qui empeche que les parties audessus n’en soient offusquées il a mieux aimé affirmer qu’il falloit retrancher totalement cette corniche, il ne c’est pas apperçû que par là il se privoit luy même de la possibilité de placer un second ordre sur le premier parceque la base du second devoit nécessairement exceder la saillie mesquine de l’architrave qu’il veut uniquement

34 sur le premier, d’après une suitte de principes qui ne sont qu’a luy, il a conçu le projet d’une eglise, d’une architecture seche, platte et si legere que les premiers principes de solidité ne s’y trouvent même pas. Je n’avance rien qui ne soit bien calculé et bien prouvé dans une réponse qui luy a été faite intitulée: E x a m e n d 'u n essa y s u r l ’a rc h ite c tu re , que j ’engage ceux qui ont fait ces critiques, de lire avec autant d’attention qu’ils en ont donné au livre du Pere Laugier [30]. (m) on seroit, je crois, fort embarassé de donner un seul exemple existant de ce nouvel arrangements de metopes et de trigliphes. Si quelqu’auteur a eu ces idées elles ont été rejettées et la raison en est simple. L ’architrave dorique par son peu de saillie ne cache pour ainsy dire rien de la frise ou ce n’est que rela* tivement a la proximité du point de vuë. ce point de vuë change toutes les fois qu’on s’approche ou qu’on s’éloigne, ainsy cette réglé d’optique ne pourroit avoir lieu que dans une décoration faite sur une ligne droitte sans avant corps et qui n’auroit qu’un seul point de vuë. (n) on a vu plus haut a la notte (1) l’impossibilité de placer un second ordre sur un simple architrave et l’utilité d’un socle audessus de la corniche pour parer les inconvénients de la saillie, il est vray qu’on ne doit se servir de piédestaux que quand la nécessité l’exige absolument, mais les socles ont des usages très raisonnables et très bons, quand on veut proscrire quelque chose, il faut en démontrer 1abus et y supleer par des moyens pratiquables. c’est ce que le P. Laugier n’a point fait a l’egard de ses innovations ainsy qu on l’a vû dans la même notte (1) et dont on peut se convaincre davantage dans la réponse qui luy a été faite. (o) Rien n’est si contraire au bon goût que l’usage déplacé des car*

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